" MARIE BATAILLE auteur littérature jeunesse, livres pour enfants, presse, roman feuilleton: ROMAN FEUILLETON / la merveilleuse histoire de Ronrono Chapati / semaine 42

ROMAN FEUILLETON / la merveilleuse histoire de Ronrono Chapati / semaine 42


Semaine 42

Maintenant Mameth était sonnée. Pourtant quelques jours auparavant elle était sortie super excitée de son passage au commissariat. Finalement devant ses cris, ses contestations et ses remarques pleines de bon sens, le député maire à la noix avait préféré retirer sa plainte et parlé sur un autre ton. L'avocat et le conseiller en communication qu'il avait appelé plusieurs fois y étaient aussi certainement pour quelque chose.
Ce n'était pas le moment, vue la morosité politique ambiante, et à quelques mois des élections, de traiter avec morgue et arrogance les petites gens. Il avait même promis de dédommager le pauvre type qui avait perdu son chien dans l'accident. En sortant du commissariat, Mameth, comme d'habitude, avait filé son adresse et son numéro de
portable au cycliste. Chaque fois qu'elle avait à faire à des situations de crise, elle éprouvait aussitôt le besoin de croire qu'elle pouvait éternellement rendre service aux autres. En général, dans l'heure qui suivait, elle regrettait d'avoir filé ses coordonnés à des gens qu'elle ne connaissait pas . Quand ces personnes appelaient le lendemain pour boire un pot ou demander quelque chose, Mameth devait se creuser les méninges pour inventer des histoires tordues capable de la sortir dignement des griffes de ceux qu'elle avait souhaité revoir la veille.
Sauf que cette fois elle n'eut pas à chercher loin pour trouver des excuses bidon. Il y avait eu l'attentat à Bombay. Un truc très grave dans sa vie personnelle et qui la privait de temps disponible pour longtemps...

Elle n'avait pas pu joindre Chloé dans les heures qui suivirent la terrible nouvelle. Elle avait alors appelé deux fois La Luppa. La première fois, un moine répondit qu'il était à la chapelle en train de prier pour son gendre et sa fille et la seconde, le même moine expliqua que La Luppa venait d'être victime d'un malaise et que le médecin était attendu. Heureusement Guillaume répondit. Il lui conseilla de se calmer. Sa soeur Ursule allait venir à Paris demain ou après demain.
Il l'avait eue au téléphone et pensait que c'était une bonne idée.
Mameth aurait quelqu'un de proche à qui parler. Il fallait laisser Chloé tranquille. Guillaume parlait régulièrement à sa soeur et lui donnait de bons conseils. Bref, Mameth comprit assez vite que Chloé ne voulait surtout pas lui parler et l'avoir dans les pattes. Alors Mameth se contenta d'envoyer un texto.
Mameth monologua beaucoup avec moi. Il y eut beaucoup de Lucien par ci et de Lucien par là, de mon pauvre Lucien si tu savais et aussi des déclarations qui allaient de ma brave bête à mon amour de chat... Des égarements à la Mameth qui essayait de surnager sans verser une larme. Il lui fallut répondre aux amis. Faire la mère normale alors qu'elle n'avait même pas entendu une seule fois le son de la voix de sa fille. Et puis Mameth avait appris par Guillaume que Chloé n'irait pas aux obsèques d'Andy. Elle était épuisée. Elle connaissait peu les parents de son mari, les frères, les soeurs, les enfants nés d'un premier mariage mais elle savait parfaitement qu'elle ne serait pas la bienvenue. Tout ces gens là avaient été écartés quand Andy avait renoncé à un mariage indien, quand il avait évoqué un mariage européen qui servirait en même temps ses affaires, un mariage enGrèce à la Onassis. Elle était évidemment tenue pour responsable de cette décision infamante. Le mariage n'aurait pas lieu en Inde, mais la
famille s'emparait des funérailles. Personne ne voulait de Chloé ce jour là.

Ce jour là, Chloé appela enfin sa mère.
D'une voix monocorde et triste, elle demanda à sa mère comment se portait le chat Lucien. Mameth en sanglot lui répondit que j'allais très bien et que j'étais en fait le plus cadeau qu'elle lui avait fait.
- Non répondit alors Chloé, j'en ai un autre bien plus beau à te faire...
- Ah! se contenta de souffler Mameth interloquée qui avait peur à chaque mot de contrarier sa fille.
- Je suis enceinte, maman.
- Oui, répondit calmement, Mameth, c'est le plus beau cadeau qu'on puisse me faire.
- Où puis-je aller guérir, maman?
- A Antisoros, ma fille. Tu es toujours en Grèce, n'est ce pas ? Prends un bateau pour Antisoros. Tu verras, là bas c'est le paradis. C'est un coin du monde que je n'ai jamais oublié. C'est là bas que je suis devenue quelqu'un d'autre.
- Pourquoi pas. Si tu le dis. Je t'appellerai quand j'y serai.
- Prends bien soin de toi, Chloé, je t'embrasse.

Chloé avait raccroché sans dire un mot de son malheur. Encore une fois elle avait porté l'estocade à Mameth. Un enfant. Chloé n'arrêtait pas de monter toujours plus haut.




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